Le point sur les marchés financiers mai 2024

Dimanche 26 mai 2024

Marchés Financiers

En mai, les chiffres économiques américains ont fait état d’une conjoncture toujours dynamique malgré quelques déceptions. Ceux de la zone euro ont confirmé une légère amélioration à partir d’une situation très atone. La baisse de l’inflation, plus convaincante en zone euro qu’aux Etats-Unis, a conduit les marchés à anticiper le fait que la BCE entamerait probablement son cycle de baisse des taux avant la Réserve fédérale.

 

Zone Euro :

 

En avril 2024, l'indice d’inflation dans la zone euro s'est stabilisé à 2,4% (en glissement annuel). L'inflation sous-jacente a diminué légèrement, passant de 2,9% en mars à 2,7% en avril. Le PIB de la zone euro a rebondi de 0,3% au premier trimestre 2024 après une contraction de 0,1% au quatrième trimestre 2023, surpassant les attentes du consensus. Cette surprise positive est attribuée à des performances meilleures que prévu dans les quatre principales économies de la zone. Sur le front de l'emploi, le taux de chômage est resté stable à 6,5% en mars 2024, avec une baisse de 94 000 personnes inscrites au chômage dans la zone euro. Le taux de chômage des jeunes a également diminué, passant de 14,4% en février à 14,1% en mars.

 

 

Etats-Unis :

 

Comme prévu, l'indice d’inflation des prix à la consommation aux États-Unis a légèrement baissé en avril à 3,4% (en glissement annuel), en raison d'un ralentissement des pressions exercées à la fois sur les biens et les services. L'inflation sous-jacente (« core CPI ») a diminué de 3,8% à 3,6%, principalement grâce à des effets de base favorables. Le marché de l'emploi a montré des signes de ralentissement, avec seulement 175 000 créations d'emplois non agricoles en mars, en deçà des attentes (243 000). Le taux de chômage a légèrement augmenté à 3,9%,  soit 63 000 chômeurs de plus. L'ISM manufacturier2 est retourné en zone de contraction à 49,2 en avril, après un mois en zone d'expansion, tandis que l'ISM des services a également déçu à 49,4, signalant une faible croissance de l'activité. Le feuilleton de la guerre commerciale avec la Chine se poursuit, et le président américain, Joe Biden, a annoncé l’augmentation des taxes douanières sur une série de biens importés en provenance de Chine. L’objectif est de protéger le secteur manufacturier domestique de la concurrence chinoise.

 

Chine :

 

En avril 2024, les indicateurs PMI3 de la Chine montrent une expansion continue, bien que fragile, de l'activité économique. Les pressions inflationnistes en Chine sont restées très modérées. Cependant, l'emploi continue de se contracter pour le troisième mois consécutif, les entreprises demeurant réticentes à augmenter leurs effectifs en raison des marges de profit serrées. Le secteur immobilier chinois reste en difficulté, avec des prix en baisse de -0,6% pour les logements neufs et de -1% pour  les logements existants, marquant la plus forte baisse historique. Les ventes de logements continuent de se contracter de manière significative, enregistrant une chute de -20% sur un an. Les autorités ont confirmé leur intention de permettre aux gouvernements locaux d'acheter des biens pour réduire les stocks de logements disponibles, bien que l'endettement élevé des provinces soulève des doutes quant à l'efficacité de cette mesure. En réponse, la Banque populaire de Chine (PBoC) a annoncé de nouveaux assouplissements des conditions d'emprunt pour les ménages, bien que l'impact attendu soit limité compte tenu des taux déjà bas. Ces mesures illustrent la volonté des autorités de soutenir le marché immobilier, mais les défis structurels persistent.

 

Banques Centrales :

Face à des statistiques économiques encourageantes, la Banque Centrale Européenne continue de défendre l’hypothèse d’une baisse de 0,25% de ses taux directeurs lors de son prochain comité qui se tiendra le 6 juin prochain. En effet, d’après la publication du compte rendu de leur dernière réunion (10-11 avril), la baisse des taux directeurs de la BCE en juin n’apparaît plus faire de doute au sein des membres. Mais cela ne présage pas pour autant d’un assouplissement monétaire rapide. En effet, la plupart des membres n’anticipent que trois baisses au total sur l’année 2024, dans une logique de prudence compte tenu des risques inflationnistes persistants et d'une croissance économique qui se redresse. Les marchés d’ailleurs tablent également sur deux à trois baisses de taux cette année avec une anticipation d’un €STR en baisse de -0,65% en 2024. Les augmentations salariales n'ont pas beaucoup ralenti au premier trimestre, ce qui pourrait pousser les entreprises à répercuter ces coûts sur les consommateurs, maintenant ainsi plus longtemps l'inflation au-dessus de 2%. D’où la volonté de la BCE de conserver une approche guidée par les statistiques macroéconomiques à venir pour chacune des prochaines réunions de politique monétaire. Aux Etats-Unis, les enjeux sont élevés pour les responsables de la Banque Centrale Américaine, qui, après avoir mené au cours des deux dernières années la série de hausses de taux d'intérêt la plus agressive en quatre décennies, tentent de naviguer entre deux risques. L'un des risques est qu'ils assouplissent la politique monétaire trop tôt, permettant à l'inflation de s'installer à un niveau supérieur à leur objectif de 2%. L'autre est qu'ils attendent trop longtemps avant la première baisse provoquant alors une récession. Jerome Powell a décrit la politique monétaire actuelle comme restrictive à bien des égards, mais a noté que seul le temps dira si elle est suffisamment restrictive pour ramener l'inflation à l'objectif de 2% de la Fed. La Réserve Fédérale avait fait marche arrière en mars/avril sur tout signal de baisse imminente des taux, jusqu’à la publication récente du dernier chiffre d’inflation (+3,4% en glissement annuel) ressorti en deçà des attentes, et marquant enfin la première baisse depuis des mois. Ces dernières statistiques portant sur l’inflation américaine, si elles se confirment, devraientpermettre à la FED d’entamer dès cette année son cycle de baisse des taux directeurs. Les anticipations de marché tablent désormais sur - 0,45% du taux des Fed Funds, soit près de deux baisses en 2024.

 

Taux :

Le cycle de croissance est divergent des deux côtés de l’Atlantique : résilient et sans baisses de taux à court terme aux US, et en reprise mais avec baisses de taux en Europe. L’environnement est complexe pour les marchés, avec une inflation sous-jacente américaine qui se révèle plus persistante que prévu malgré des signes de décélération de l’activité. Après avoir atteint un pic à 4,70% fin avril, les obligations souveraines américaines à 10 ans ont affiché une nette détente, pour s’inscrire dorénavant autour de 4,40%. Ce rallye obligataire a démarré après la publication des chiffres macroéconomiques récents aux Etats-Unis, qui ont reflété à la fois des signes de ralentissement de l’inflation et de la consommation des ménages américains. Des données qui offrent un léger soulagement à la Fed. Depuis la mi-avril, les taux des obligations d’Etat américaines ont plus reculé que leurs homologues allemands, comme en témoigne le resserrement de l’écart des rendements à 10 ans, entre le T notes et le Bund qui a évolué de 2,15% à 1,90% le 22 mai. Le Bund, après un plus haut à 2,65%, s’inscrit aujourd’hui un peu au-dessus de 2,50%. Cette dernière quinzaine se caractérise ainsi par une sorte de resynchronisation entre les deux régions et surtout entre les actions attendues de leurs banques centrales. Cette réaction des marchés est probablement liée à l'essoufflement de la narrative taux élevés/reflation aux Etats-Unis, là où, en Europe, les risques de contagion de reflation et/ou reprise économique se font plus ressentir. Les marchés obligataires restent volatils et fragiles dans un contexte géopolitique tendu. Sur le marché des obligations d’émetteurs privés euro de bonne qualité (Investment Grade), il ne fait aucun doute que l'appétit est encore très présent. Les émissions syndiquées ont rencontré de francs succès avec des demandes surpassant largement les volumes alloués. Les niveaux élevés des rendements les rendent attractifs et ce malgré des valorisations chères (spread de crédit très serrés).

Dans nos portefeuilles, nous avons à nouveau réduit notre exposition aux taux souverains US, mais avons globalement maintenu une sensibilité aux taux d’intérêt supérieure à celle de nos indices de référence. Nous restons flexibles dans notre positionnement en termes de duration, afin de profiter de la volatilité des marchés qui permet des prises de positions plus tactiques. Nous avons également maintenu notre exposition sur la dette obligataire émergente dont les rendements nous semblent attractifs. Sur le marché du crédit, en raison de fondamentaux solides, nous maintenons une surpondération sur les émetteurs européens de bonne notation (catégorie Investment Grade). Ces investissements sur les obligations privées nécessitent néanmoins d’être sélectifs sur la qualité et la liquidité de l’émetteur, ils permettent ainsi de bénéficier du portage attractif de cette classe d’actif.

Actions :

Après la consolidation observée en avril, les marchés actions sont revenus sur leurs plus hauts ou ont établi de nouveaux records selon les indices. Ce rebond s’explique par deux facteurs principaux : un repli des taux et une saison de résultats des entreprises, du premier trimestre, au-dessus des attentes, de part et d’autre de l’Atlantique. Aux Etats-Unis, les données plus faibles sur la croissance et sur le marché du travail ainsi qu’un taux d’inflation en léger repli ont, en effet, permis un recul des rendements obligataires et ont rassuré quant aux perspectives de baisse des taux de la banque centrale américaine. Son président, Jerome Powell, a en outre confirmé que la prochaine décision de politique monétaire serait plus probablement une baisse qu’une hausse des taux, scénario que les marchés commençaient à redouter. En zone euro, un nouveau repli de l’inflation, ouvrant la voie à une prochaine baisse des taux de la banque centrale européenne, ainsi que des chiffres économiques, confirmant un rebond progressif de la croissance, ont aussi augmenté la confiance des investisseurs. Concernant les résultats trimestriels, 80% des entreprises américaines et 60% des entreprises européennes ont publié au-dessus des attentes du consensus et la grande majorité des entreprises se sont montrées confiantes pour le second semestre de l’année. C’est aussi la première fois de l’année que les perspectives de croissance des bénéfices sont revues à la hausse par les analystes tant pour 2024 que pour 2025.

 

 

Dans ce contexte, au 22 mai, les marchés développés progressent depuis le début d’année de +9,35% selon l’indice actions monde MSCI World (en dollar). L’indice large des actions américaines S&P500 affiche une performance de +11,26% (en dollar), celui des actions européennes STOXX 600 de +8,81% (en euro) et celui des actions japonaises TOPIX de +15,68% (en yen). La performance des marchés émergents, qui était en fort retrait par rapport à celle des pays développés, s’est aussi nettement redressée grâce à l’amélioration des données économiques chinoises et aux achats à bon compte après de nombreux trimestres de sous performance. L’indice MSCI Emerging Markets au 22 mai est dorénavant en progression de +6,99% (en dollar) depuis le début d’année.

 

Au niveau sectoriel, les secteurs sensibles aux taux tels l’immobilier ou les services aux collectivités, qui avaient fortement sous-performé depuis le début d’année, ont connu un rebond et s’inscrivent parmi les meilleures performances au mois de mai. Le secteur de la technologie, après les prises de bénéfices observées en avril, a lui aussi profité du contexte de baisse des rendements obligataires pour progresser fortement. Le secteur des matières premières qui affichait une des plus mauvaises performances depuis le début d’année s’est offert aussi un net rebond grâce à l’amélioration de la croissance chinoise et à l’offre d’achat lancée par BHP, groupe minier australien, sur son concurrent britannique Anglo American. Le secteur bancaire a quant à lui poursuivi sur sa tendance haussière grâce à de très bonnes publications. A contrario, le secteur de la consommation discrétionnaire et le secteur de l’automobile en particulier, qui étaient parmi les meilleures performances depuis le début d’année, ont subi des dégagements après des résultats jugés décevants.

 

Disposant d’une allocation sans biais de style ou sectoriel trop marqué nous n’avons pas procédé à des ajustements significatifs au cours de la période. Nous avons par contre augmenté notre surexposition sur les actions de la zone euro qui devrait profiter d’une valorisation plus faible que celle des marchés américains, d’une amélioration de sa trajectoire de croissance, d’un potentiel plus élevé de révisions à la hausse des perspectives  bénéficiaires de ses entreprises, d’une plus grande exposition à un rebond de la croissance chinoise et d’une désynchronisation des politiques monétaires avec une banque centrale européenne qui devrait être la première à baisser ses taux.

  

1 Le taux d'inflation sous-jacente est calculé par l'indice des prix à la consommation (IPC) hors alimentation et énergie. C'est ce que l'on appelle le core CPI en anglais.

2 Publié chaque mois par l'organisme américain "Institute for Supply Management, l'indice ISM est séparé en deux grandes familles : L'ISM manufacturier, qui reflète la santé du secteur aux USA et l'ISM services, plus spécifique aux activités tertiaires. Cet indice, évalué en pourcentage, résulte d'une enquête auprès de 400 entreprises portant sur des données telles que : indicateurs sur les nouvelles commandes, production, emploi, délais de livraison, prix, stock, commandes à l’export et l’import ... On considère qu’une valeur supérieure à 50% indique une expansion par rapport au mois précédent, si l’indice est inférieur à 50%, cela indiquera alors une contraction.

3 L'indice des directeurs d'achat (PMI) du secteur manufacturier en Chine fournit, chaque mois, une indication précoce des activités économiques du secteur manufacturier chinois.

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